Ces dernières heures, Sandeep Nailwal, cofondateur et PDG de la Fondation Polygon, a publiquement exprimé son amertume envers l’écosystème Ethereum, remettant en cause la reconnaissance de Polygon comme couche 2 légitime. Ce malaise, partagé par d'autres figures historiques de l’écosystème crypto, ouvre la voie à une remise en question plus large du leadership de la Fondation Ethereum. Pourquoi ce coup d’éclat maintenant, et quelles en sont les implications pour l’avenir de la scalabilité sur Ethereum ? Décryptage.
Tensions à vif entre Polygon et Ethereum
Sandeep Nailwal n’a pas mâché ses mots. Dans une série de messages publiés le lundi sur X (anciennement Twitter), il a exprimé son profond désarroi quant à la manière dont Ethereum traite Polygon. « Je remets aujourd’hui en question ma loyauté envers Ethereum », a-t-il déclaré , déplorant l’absence de soutien de la part de la Fondation Ethereum, voire une hostilité tacite. Nailwal affirme que cette fidélité lui aurait coûté « des milliards de dollars » en valorisation. Il ajoute : « La communauté Ethereum est un vrai bordel depuis un moment. Elle doit sérieusement se regarder en face. »
Cette sortie a immédiatement suscité des réactions. Si certains y voient un exutoire personnel, elle fait aussi écho à d’autres critiques internes. Nailwal a notamment partagé une ancienne lettre de Péter Szilágyi, ex-chercheur à la Fondation Ethereum, dénonçant les dysfonctionnements internes. Eric Conner, développeur historique d’Ethereum, avait lui aussi claqué la porte en janvier, mettant en cause la gouvernance et les décisions stratégiques de Vitalik Buterin. Plusieurs figures de l’écosystème Solana ont même appelé Polygon à « s’allier à Solana », suggérant un rapprochement qui ferait l’effet d’une bombe dans la DeFi.
La réponse mesurée de Vitalik et la question du statut technique
Face à cette charge frontale, Vitalik Buterin a pris la peine de répondre, adoptant un ton plus apaisé. Il a salué les contributions de Polygon, citant notamment Polymarket, l’une des plus grandes plateformes de marché prédictif, ou encore l’avance technologique de l’équipe sur le zk-EVM. Il a aussi reconnu les efforts humanitaires de Sandeep Nailwal avec le projet CryptoRelief en Inde, preuve que les tensions ne remettent pas en cause le respect mutuel entre les leaders.
Cependant, Buterin a aussi subtilement recadré le débat technique. Selon lui, Polygon ne peut pas être considéré comme une véritable couche 2 tant qu’il n’intègre pas un système de preuve cryptographique garantissant la sécurité d’Ethereum. Il souligne que ce composant essentiel est aujourd’hui disponible « clé en main » via des stacks ZK, et que le coût de vérification est désormais dérisoire (0,0001 $ par transaction crypto). En creux, le message est clair : la porte est ouverte, à condition que Polygon adopte les standards techniques de la communauté L2.
Cette séquence ouvre une réflexion plus large : comment définir l’appartenance à l’écosystème Ethereum, et selon quels critères ? Si la dimension technique prime, certaines solutions hybrides comme Polygon devront choisir entre indépendance et intégration. À l’heure où la compétition entre L2 et les blockchains rivales comme Solana s’intensifie, ces frictions internes pourraient affaiblir Ethereum face à ses concurrents. Polygon, lui, semble prêt à remettre les compteurs à zéro.